1. Introduction
En Suisse, aujourd’hui, la protection de la faune et de la flore est de plus en plus importante et suscite toujours plus d’attention. L’homme a détruit et continue de détruire une grande partie des habitats naturels. Les amphibiens sont particulièrement touchés et donc très ciblés par les mesures de sauvegarde. Les cours d’eau sont canalisés ce qui assèche les zones alluviales naturelles, les milieux humides et les marais sont drainés, asséchés et comblés pour laisser place à des champs cultivables. Les routes posent également beaucoup de problèmes lors de la migration des batraciens pour aller de leur lieu d’hivernation, en forêt pour la plupart du temps, au point d’eau où ils resteront tout l’été pour se reproduire. Aujourd’hui, pour éviter que ceux-ci ne se fassent écraser, les routes concernées par un important afflux de batraciens sont munies d’une barrière à amphibiens.
Une autre source de déclin chez les amphibiens est la chytridiomycose [annexe 5]. C’est une maladie qui ne touche que les batraciens et qui pose de gros problèmes aux espèces touchées. Sa présence en Suisse ainsi que dans le canton de Fribourg n’a pas encore eu trop d’impact sur la mortalité des batraciens, mais la maladie reste sous surveillance. (5)
Avec mon tuteur, Monsieur Thierry Wannier, et mon superviseur, Monsieur Adrian Aebischer du bureau du Service des forêts et de la faune, nous avons pris la décision d’étudier le sonneur à ventre jaune qui est une espèce de crapaud prioritaire du programme forestier suisse. Cet amphibien est en danger et fait partie de la liste rouge des espèces menacées de Suisse [annexe 1]. Le sonneur à ventre jaune, ainsi que les autres amphibiens, et leurs sites de reproduction sont protégés par la loi suisse. (11)
J’ai choisi ce sujet de TM pour pouvoir faire un travail scientifique de recherche sur le terrain. J’avais déjà pu rencontrer cet amphibien auparavant et je voulais en apprendre plus sur lui. Le sonneur est un animal sensible, il a besoin de conditions assez particulières pour vivre ; gouille peu profonde, ensoleillée, sans trop de végétation et sans trop de dérangements humains. Mon objectif est de recenser de tels endroits afin de protéger et de maintenir cette espèce dans la vallée. (6)
Avec ce travail, j’espère me rendre utile au canton et m’investir pour la protection de cet amphibien. Je souhaite cartographier chaque population avec ses lieux de vie et ses lieux de reproduction. J’aimerais découvrir de nouveaux sites habités ainsi que des lieux favorables à l’aménagement d’habitat pour le développement de ce crapaud. Je souhaite aussi déterminer la taille des populations, estimer leur potentiel de survie et suivre leur évolution dans la vallée.
2. Matériel et méthode
Les amphibiens sont des animaux qui vivent dans l’eau à l’état larvaire et sur terre une fois adulte. La classe des amphibiens est divisée en trois ordres : les anoures, les urodèles et les cécilies. Les anoures regroupent toutes les grenouilles, les crapauds et les rainettes. Ils se différencient des autres ordres par la disparition de la queue à l’âge adulte. C’est à ce groupe qu’appartient le sonneur à ventre jaune. En opposition aux anoures, les urodèles forment le groupe qui garde leur queue toute la vie comme les salamandres et les tritons. Et pour finir les cécilies, apodes ou gymnophiones regroupent les amphibiens vermiformes avec la particularité d’être recouvert d’écailles comme les poissons. (14)
2.1 Le sonneur à ventre jaune
Le sonneur à ventre jaune (Bombina variegata) est l’une des 9 espèces d’amphibiens les plus menacées de Suisse. On le trouve un peu partout en Europe et on peut aussi rencontrer son proche cousin le sonneur à ventre de feu (Bombina bombina) à l’est du continent. En Suisse, il est principalement présent sur le plateau et dans les zones de plaine en dessous de 800 mètres d’altitude [annexe 2]. Sa distribution a régressé de 50% ces dix dernières années. Dans le canton de Fribourg, on l’a observé le plus souvent dans le nord [annexe 3]. (1,11)
2.1.1 Description
Le sonneur à ventre jaune ou sonneur aux pieds épais fait partie de la famille des discoglossidés et appartient au groupe des crapauds dû à sa peau très verruqueuse. C’est un petit crapaud qui, une fois l’âge adulte atteint, mesure entre 4 et 5 centimètres et qui a une durée de vie moyenne de 5 ans. On sait que certains individus peuvent même vivre jusqu’à 15 ans. Morphologiquement, il a la tête et le tronc aplatis, un museau arrondi, des tympans non visibles et des pattes postérieures palmées jusqu’à l’extrémité des doigts. Une caractéristique très
spéciale du sonneur est qu’il a une pupille en forme de cœur
ou de triangle et sa peau est pourvue de multiples petites "épines" noires sur chacune des verrues. Sa coloration caractéristique est à l’origine de son nom : le dos du sonneur peut avoir une teinte entre le brun-gris et le brun-vert tandis que le ventre est jaune recouvert de taches qui varient du noir au gris-bleu. Chaque graphisme ventral est unique à chaque individu. C’est grâce à cela qu’il est possible de suivre les individus sur plusieurs années, c’est la méthode de photo-identification. Le sonneur ne peut pas être confondu avec un autre amphibien, c’est vraiment le seul crapaud avec autant de petites verrues à point noir et il n’y en a aucun autre en Suisse avec un tel graphisme ventrale. (1,2,4,5,6,7,8,9,10,15)
Chez les têtards, les couleurs divergent entre le brun et le gris pour le corps et beige pour la queue mais plus il grandit plus il devient foncé. Leur queue arquée, dont la racine remonte jusqu’à mi-dos, ainsi que leurs grands yeux foncés qui ressortent beaucoup sur leur peau transparente, sont les critères les plus évidents pour les déterminer. Chez beaucoup de têtards on ne distingue pas les yeux car ils ont le corps très foncé avec des yeux noirs. Très vite on voit apparaître des taches noires sur son ventre qui deviennent de plus en plus nombreuses et précises avant de voir apparaître le fameux jaune qui débute des pattes, avant de se propager sur tout le reste de la face ventrale. Les têtards se nourrissent de végétaux, mais une fois adulte, le sonneur se nourrit principalement d’insectes, de vers, de petits crustacés et d’autres petits animaux qu’il peut trouver. (4,5,6,9,15)
Le nom de « sonneur » est dû au fait qu’il n’a pas de sac vocal et donc il émet un chant discret, et non un coassement, lors de la période de reproduction. C’est une succession de « hou hou hou» émis par les cordes vocales de l’animal, qui résonnent dans sa bouche et qui « sonnent ».
C’est seulement pendant cette période que nous pouvons distinguer les mâles des femelles malgré que les femelles soient, en temps normal, plus grandes que les mâles. On appelle cela un dimorphisme sexuel. Les mâles développent des callosités nuptiales, sortes de petites pelotes foncées qui apparaissent aux avant-bras, aux doigts et aux orteils, servant à s’agripper plus fermement à la femelle lors de l’amplexus lombaire. Il atteint la maturité sexuelle au bout de deux ou trois ans. Dans les zones où le sonneur à ventre jaune et celui à ventre de feu cohabitent, il se peut que les deux espèces s’hybrident et donnent de nouveaux sonneurs difficiles à classer. (5,6,7,9,10,12,15)
2.1.2 Mœurs
Le sonneur est actif à partir de la fin avril jusqu’au début septembre en fonction de la météo. Il se reproduit entre le début mai et le début août dans les gouilles chaudes et peu profondes, donc susceptibles de s’assécher pendant le développement des œufs ou des têtards. C’est pour cela que la femelle du sonneur arrive à fractionner sa ponte, d’environ 200 œufs, en petits groupes de 1 à 30 œufs qu’elle disperse dans différentes gouilles. C’est le seul amphibien qui pond des grappes de si peu d’œufs, souvent celles des grenouilles atteignent plus de 500 œufs et les chaines des crapauds atteignent environ les 1000 œufs. Ainsi la chance qu’une partie survive face aux prédateurs aquatiques comme les poissons, les larves de libellules, les larves de dytiques ou aux prédateurs terrestres tels les oiseaux, les serpents et autres carnivores, augmente. Les femelles peuvent faire jusqu’à 8 pontes par saison en fonction de la météo. Le développement du têtard est assez rapide toujours pour la même raison, le risque assèchement de la zone de reproduction. Les œufs mettent entre 2 et 8 jours pour éclore puis les têtards se métamorphosent pendant une durée de temps qui varie entre 1 et 3 mois en fonction de la chaleur de l’eau. Ceux-ci peuvent supporter une chaleur allant jusqu’à 36°C ainsi qu’une sécheresse temporaire. Aucun adulte ne reste dans l’eau pour surveiller ou protéger sa descendance. (2,4,5,6,10,15)
Une fois leur développement fini, les jeunes sonneurs sortent de leur gouille et se dispersent dans un rayon allant jusqu’à 2 kilomètres autour de leur lieu de naissance. Les sonneurs restent normalement dans l’eau jusqu’en octobre puis ils partent à la recherche de leur site d’hivernation qui peut être dans la vase, dans un abri sous une pierre, dans une galerie abandonnée ou sous une souche. Ils y restent jusqu’en avril ou lorsque les températures clémentes sont de retour. (5,8,15)
Le sonneur vit autant de jour que de nuit mais est beaucoup plus actif de nuit durant la période de reproduction où les mâles flottent à la surface de la gouille les membres écartés. Ils chantent en concert avec les autres prétendants pour essayer d’attirer une femelle qui change de partenaire à chaque nouvelle ponte. Ils se déplacent d’un point d’eau à un autre de nuit pour éviter d’être repérer trop facilement. (7,15)
Sa couleur dorsale lui procure un très bon camouflage pour passer inaperçu sur un sol terreux. Mais lorsqu’il se sent en danger face à un prédateur, homme compris, il entre en catalepsie. Le sonneur adopte une posture de lordose lombaire, il se cambre et remonte ses pattes avant et postérieures pour exposer ses couleurs vives, leur signalant sa toxicité. Dans de telles circonstances, il sécrète une toxine qui le rend incomestible. (1,2,5,6,7,10,12,15)
2.1.3 Habitats
Les sonneurs ont besoin d’un biotope très particulier. Les plans d’eau favorables à leur présence sont ceux qui se réchauffent rapidement et qui restent en eau au minimum 8 semaines entre avril et août pour le développement des têtards. Ils doivent s’assécher annuellement en automne et en hiver pour éviter la présence de prédateurs ou toute croissance de végétaux. Ces gouilles sont souvent sur un sol argileux pour que l’eau soit stagnante mais aussi pour que le sonneur puisse passer inaperçu. (2,5,11,15)
Les sonneurs vivent principalement dans des gouilles comme celles qui se forment dans les gravières, dans les ornières ou sur les chantiers à condition qu’il n’y ait pas trop d’activités qui les dérangent. On les retrouve aussi dans les gouilles sur les berges après la montée des eaux, dans les fossés, dans les prairies humides, en forêt et en bordure de chemin. Il est possible encore de les observer dans les marais, les étangs et les ruisseaux à faible courant mais il ne doit pas y avoir de poissons. La plupart des batraciens arrivent à sentir la présence ou l’absence de poissons dans un point d’eau. (2,4,5,6,10,11,12,15)
La dimension des plans d’eau varie entre 0.5 et 20 mètres carrés pour une profondeur d’environ 10 à 60 centimètres. Chaque zone d’habitat devrait idéalement comprendre plusieurs gouilles de tailles différentes. Pour l’aménagement d’un nouveau site, plusieurs conditions sont indispensables. Il doit se trouver à une distance colonisable à partir d’une zone habitée donc entre 500 mètres et 2 kilomètres de celle-ci. L’endroit doit être bien ensoleillé mais pas trop exposé pour ne pas qu’il s’assèche trop rapidement. Il est préférable que le site soit naturellement humide pour éviter un manque d’eau. Il doit être accessible aux hommes pour avoir la possibilité de l’entretenir à long terme comme par exemple en cas d’envahissement végétal. Un site de ponte doit se situer à moins de 50 mètres du nouvel aménagement. Le terrain doit être pourvu d’endroits où le sonneur peut se réfugier au bord de l’eau et où il peut hiverner pendant la saison froide, comme des bandes herbeuses, des bosquets, des tas de pierres ou de bois, des souches ou des fourrés. Une forêt à proximité de la zone serait souhaitable comme lieu d’hivernage. (11,15)
2.2 Zones d’étude
Mes zones d’étude, situées dans la vallée du Bas-Intyamon, ont été définies par M. Aebischer en fonction des sites déjà connus auparavant[1], des gravières présentes dans la région et des endroits sur les berges de la Sarine où d’éventuelles gouilles pourraient accueillir le sonneur. Au total, cela représente 13 zones à visiter et à contrôler. Nous les avons numérotées du nord au sud sur la carte ci-dessous. Elles se situent le plus souvent près de la rivière entre une altitude de 700 et 750 mètres. Parmi ces sites, nous trouvons des gravières, des zones alluviales, des gouilles présentes toute l’année, un bassin de décantation et une zone de compensation.
2.2.1 Site 1
C’est une grande zone alluviale qui se trouve sur la rive gauche de la Sarine. Une petite rivière assez calme la traverse et inonde une partie de la forêt. Il n’y a pas une très grande exposition au soleil et la rivière a sa source dans les montagnes donc l’eau reste relativement froide même en été.
2.2.2 Site 2
Ce site se trouve dans la gravière Grandjean&Fils SA à Enney et il y a deux gouilles bien ensoleillées, très favorables au sonneur. Les activités humaines ne dérangent pas beaucoup les deux habitats.
La première, dans un trou entouré de gravier, est traversée par un petit muret ce qui fait que la gouille est séparée en deux parties gauche et droite. L’eau est toute trouble et n’est pas très propre. La gouille n’est pas grande mais elle est assez profonde.
La deuxième gouille est vraiment au milieu de la gravière dans un grand trou où l’eau de pluie est récupérée. Sa surface est plus grande que la première et est autant profonde. L’eau est souvent trouble et assez sale à cause des déchets amenés par la pluie.
2.2.3 Site 3
Ce site n’existe plus. Il y avait auparavant une haie humide mais celle-ci a été enlevée. Maintenant, il ne reste que des champs.
2.2.4 Site 4
Il s’agit de la gravière d’Estavannens. Ce site a des places favorables au sonneur avec des points d’eau qui se forment avec la pluie, mais il y a une forte activité humaine et toutes les gouilles ne restent pas très longtemps en place.
2.2.5 Site 5
C’est la deuxième gravière Grandjean&Fils SA d’Enney située à « la Deléje ». Il y a quelques gouilles intéressantes pour le sonneur mais elles sont toutes trop stériles avec beaucoup de sédiments dans l’eau. Une seule gouille est favorable malgré que c’est une zone de nettoyage ce qui implique que de l’eau froide est ajoutée presque en permanence et la gouille ne peut pas se réchauffer.
2.2.6 Site 6
C’est un site qui se situe sur la rive gauche de la Sarine dans l’ancienne gravière des Auges à Villars-sous-Mont. En 1992, à la fin de son exploitation, la zone n’a pas été comblée pour aménager un biotope adéquat aux amphibiens et a été inscrite à l’inventaire des sites d’importance nationale. Il est formé de deux grandes gouilles (presque des étangs) qui sont permanents, d’une prairie inondable et de zones pionnières. Des poissons non indigènes (poissons rouges et vairons) y ont été relâchés par des personnes pensant bien faire mais mal informées sur les conséquences d’un tel geste car comme déjà dit précédemment, les poissons sont les plus grands prédateurs des œufs et têtards d’amphibiens. (3,13)
Parfois la zone est totalement inondée mais le niveau de l’eau varie beaucoup avec les précipitations ou l’ensoleillement. Lorsque l’eau redescend, des gouilles, idéales pour la reproduction du sonneur, se forment sur les rebords des étangs. Mais pour cela, il ne faut pas que les gouilles s’assèchent trop vite sur le sol caillouteux ni que l’eau déborde une seconde fois sinon les œufs et les têtards seront tout de suite mangés par les nombreux poissons.
2.2.7 Site 7
Ce site est un bassin de décantation également situé dans les Auges. Il comporte trois compartiments : le premier trou est très profond, le deuxième a une partie basse avec beaucoup de boue et de nouveau une partie plus profonde et le troisième est celui utilisé pour le moment et il est rempli à 95% de boue. Le site est très exposé au soleil et presque sans risque assèchement.
2.2.8 Site 8
C’est une zone de compensation sur la commune de Grandvillard qui a été créée en 2011 pour équilibrer la perte du biotope lors de la construction de la gravière JPF (site 9). Il est constitué d’une dizaine de petites gouilles entourées d’arbustes et situées le long d’une côte pour que l’eau de pluie les alimente naturellement. Cette zone comporte aussi des tas de pierres et de branches mortes pour permettre à l’amphibien d’hiverner. La zone est bien exposée au soleil.
2.2.9 Site 9
C’est la gravière JPF de Grandvillard. Ce site ne comporte aucune gouille parce que la majorité de la zone est goudronnée et il y a beaucoup trop d’activité donc ce n’est pas un endroit adapté pour le sonneur.
2.2.10 Site 10
Cette zone se situe sur la rive droite de la Sarine. Dans le passé le site se faisait inonder par la rivière et des gouilles, dans lesquelles le sonneur a déjà pu être observé, se formaient. Aujourd’hui, à cause de l’endiguement, l’eau ne remonte plus aussi haut et les gouilles ne se créent plus.
2.2.11 Site 11 & 12
Ce sont deux anciennes zones alluviales qui ne se font plus inonder du fait que la Sarine est trop basse. Les bras de rivière du côté gauche et droit de la Sarine sont inaccessibles car la forêt et la végétation sont beaucoup trop denses.
2.2.12 Site 13
C’est une zone alluviale qui n’est plus non plus inondée par la Sarine mais par les deux petites rivières qui passent au travers du site. Cela crée des gouilles mais le courant est trop fort et des poissons y vivent.
2.3 Sorties sur le terrain
Des objectifs ont été définis avant les premières sorties pour connaître tous les paramètres à prendre en compte une fois sur le terrain. Mon étude avait les objectifs suivants :
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Confirmer la présence ou non des sonneurs sur les sites connus dans le Bas-Intyamon [annexe 4].
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Étudier et évaluer le biotope des sites connus : trop de végétation, risque de pollution, risque de sécheresse, présence de prédateurs ou autre fait important.
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Rechercher la/les cause(s) si un site connu est inhabité.
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Effectuer régulièrement des sorties afin de compter les adultes et déterminer l’influence des conditions météorologiques sur leur détectabilité.
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Observer et étudier leur reproduction et développement (à quelle période, de quelle façon, les bruitages = le chant des mâles lors de la période de reproduction, quelle quantité d’œufs lors de la ponte, durée du développement, etc.).
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Déterminer avec quelle(s) autre(s) espèce(s) cohabite(nt) le sonneur.
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Rechercher de nouvelles gouilles habitées et réaménager les anciennes si besoin.
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Proposer éventuellement la création de nouvelles gouilles si le biotope est adéquat.
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Cartographier précisément la répartition du sonneur dans la vallée du Bas-Intyamon.
Pour la première sortie, M. Aebischer est venu avec moi me montrer certains sites et m’expliquer comment observer cet amphibien discret. Ensuite, j’ai entrepris seul les démarches pour trouver, visiter et continuer de contrôler toutes les zones. A chaque sortie, je devais prendre en compte le temps qu’il faisait et la température, l’heure à laquelle j’étais sur place, les espèces que je rencontrais, les observations d’œufs, de têtards, de jeunes et d’adultes et si quelque chose était intéressant à relever. Bien sûr, je sortais toujours avec un appareil photo car dans les zones humides il n’y a pas que des batraciens ! Chaque site a été contrôlé entre 2 et 12 fois à part s’il n’y avait vraiment aucune chance que le sonneur y soit présent après la première visite ou s’il n’était pas accessible.
La région n’avait plus été contrôlée depuis 2011 (sauf certaines zones comme la 6 et la 8). Le 23 avril 2016, lors de cette première visite, nous n’avions aucune idée si nous allions pouvoir observer des sonneurs ou pas. C’était un peu la surprise pour tous les deux et nous ne savions pas ce que nous allions trouver. Mais nous étions assez confiants car la région comportait une grande diversité de sites et un bon ensoleillement pour que les gouilles exposées se réchauffent vite.
Lea Megali, cheffe de projets agriculture et biodiversité du parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut, m’a également accompagné lors d’une de mes sorties. Durant l’année 2016-2019, le parc a organisé un projet « espèces cible » qui prévoit la préservation et la promotion d’espèces cibles et de milieux naturels prioritaires. Les amphibiens ont été choisis comme groupe d’espèces cibles pour 2016 et 2017 [annexe 6].
Tous les autres sites n’ont pas eu de résultats importants à relever. Dans les sites 1, 3, 4, 9, 10, 11, 12 et 13 aucun sonneur ou un autre amphibien n’a été observé. Les causes en seront discutées au point 4.1.
3.1 Autres espèces de batraciens vivants dans les mêmes milieux que le sonneur
Lors de mes sorties, j’ai rencontré d’autres batraciens vivant dans un même biotope que le sonneur. Le plus courant a été le crapaud commun. Ce dernier se reproduit un peu partout mais durant cette saison, il s’est beaucoup reproduit dans les étangs du site 6 car c’est le seul amphibien à ne pas craindre les poissons. Déjà dans ses œufs, le crapaud possède une substance toxique ou très mauvaise pour les prédateurs. De ce fait, il profite de pondre dans les endroits où il n’aura aucun concurrent pour la nourriture. De plus, chaque crapaud commun femelle pond entre 1000 et 8000 œufs donc cela peut créer des nuées de têtards tout noirs comme cette année dans la zone 6 où des milliers et des milliers de têtards tapissaient les bords des étangs. J’ai également croisé le crapaud commun adulte hors des sites définis, durant une sortie de nuit. Le deuxième amphibien est la grenouille rousse qui est aussi très répandue dans nos régions. Elle pond dans toutes les gouilles qu’elle trouve. C’est pour cela que ce n’est pas étonnant de trouver ses têtards noirs pointillés de blanc dans les gouilles du sonneur. Ensuite, j’ai trouvé des têtards dans la seconde gouille du site 2, mais je n’ai pas réussi à déterminer de quelle espèce il s’agissait. Pour finir, lors d’une visite de nuit, j’ai entendu le chant de deux individus de la même espèce sans réussir à les voir. Malgré mes connaissances, je n’ai pas pu déterminer de quel amphibien il s’agissait.
3.2 Conditions météorologiques d’avril à septembre
Le mois d’avril a été froid et accompagné de beaucoup de pluie. Nous avons dû attendre le 23 avril pour faire la première visite des sites alors que normalement nous avions prévu de commencer l’observation des sonneurs à la mi-avril (début de la haute période pour les adultes). Malgré les 9°C du matin, nous avons observé nos deux premiers sonneurs, ce qui était assez surprenant. En mai, la température n’était toujours pas très chaude avec peu de soleil et des précipitations, mais les sonneurs avaient déjà commencé leur période de reproduction. A la fin du mois de mai, les températures ont rechuté et une période de pluie s’est installée jusqu’à la fin juin. Les sorties devenaient inutiles car les sonneurs ne se montraient pas. Le beau temps finit par arriver mais les plus petites gouilles s’asséchèrent rapidement ce qui posa quelques soucis pour la ponte des œufs et le développement des têtards. Etant absent durant tout le mois de juillet, je n’ai pas effectué de sorties. Au mois d’août, les températures variaient beaucoup passant de moins de 20°C à 30°C, mais le temps restait sec et certains sites ont été presque totalement asséchés. En septembre, les nuits sont redevenues vite froides et les sonneurs partaient déjà pour trouver leur lieu d’hivernation donc mes sorties se sont arrêtées à ce moment-là.
3.3 Découvertes complémentaires
Durant la période de mes observations, deux gouilles à sonneur ont été découvertes en forêt de Bouleyres. La première, découverte le 29 juin aux coordonnées 46°39’08’’N 7°09’22’’E, était habitée par trois sonneurs adultes et quelques têtards. Je pouvais encore observer le reste des grappes d’œufs déposées par le sonneur sur les herbes qui trempaient dans l’eau. La deuxième, découverte le 10 août aux coordonnées 46°36’11’’N 7°05’03’’E, était habitée par un sonneur adulte, beaucoup de tout jeunes sonneurs déjà complètement formés et beaucoup de têtards très foncés pour des têtards de sonneur. Les couleurs ventrales des sonneurs de forêt étaient un peu différentes de celles des sonneurs de l’Intyamon : ceux de forêt avaient des tâches noires plus nombreuses et plus foncées. Le jaune était également très intense alors que ceux de l’Intyamon ont un jaune assez clair.
4. Discussion
On remarque tout de suite que le sonneur adulte est beaucoup plus actif de nuit que de jour surtout lors de la période de reproduction. On peut observer des individus toute la journée, mais c’est surtout le cas des jeunes qui sont actifs 24h/24 pour se nourrir.
La période de reproduction a débuté presque dès leur sortie d’hivernation soit environ à partir de la fin avril lorsque les températures ont enfin atteint les 15°C. C’est la température minimale pour que le sonneur sorte d’hivernation et commence à être actif. Peu de temps après leur sortie, j’ai observé déjà plusieurs couples en position d’amplexus lombaire. Lors de ma deuxième sortie, j’ai trouvé la seule grappe d’œufs que je verrai durant mes observations dans une petite gouille juste à côté du site 7 principal. Mais ce résultat est normal du fait que les œufs se développent très rapidement, entre 2 et 8 jours et qu’ils sont plus difficiles à voir étant pondu dans les herbes et en petits groupes. Après éclosion des œufs, j’ai compté les têtards et à chaque sortie j’en ai compté un nombre différent… En effet, les têtards sont petits et ils peuvent facilement se cacher, mais une fois plus grands, ils sont donc plus visibles et le comptage est plus précis. C’est aussi pour cela que, lors du troisième comptage, j’en ai obtenu le plus grand nombre. Par la suite, j’ai perdu leurs traces car l’eau dans laquelle ils étaient s’est déversée dans la zone de décantation suite à une grosse averse. Durant cette période de reproduction, j’ai entendu plusieurs fois le chant des mâles, mais surtout pendant les sorties de nuit sur le site 2. Ensuite, j’ai pu observer le développement complet du sonneur depuis le petit têtard avec la queue jusqu’au jeune adulte tout formé en passant par l’étape des pattes arrière puis des pattes avant et tout cela en environ trois mois. La période de reproduction s’est arrêtée environ le 6 août avec le dernier chant entendu. Autour du 20 août les jeunes sonneurs ont commencé à quitter leur point d’eau pour partir à la recherche d’un lieu d’hivernation.
La météo n’a pas eu une grande importance sur la présence des batraciens dans les gouilles. Qu’il pleuve, fasse grand soleil ou nuageux, les sonneurs ont toujours été actifs. Pour les températures c’est différent. Il n’est actif qu’à partir de 15°C en moyenne et lors de période plus froide, comme en juin pour cette année, les sonneurs restent cachés jusqu’à ce que les températures remontent.
Les habitats 2, 5, 6, 7, 8 et 10 font partis des sites déjà connus et encore existant. La présence du sonneur a été confirmée partout sauf sur les sites 6 et 10. Il en résulte que ce batracien est toujours présent dans la région depuis 1990. Ce résultat est très positif pour le canton, cela prouve que les écosystèmes restent saints et sont encore bien adaptés comme habitat pour cet amphibien. Ce sont des sites qu’il faut absolument conserver et garder intact le plus longtemps possible pour espérer la survie du sonneur.
Alexandre Schlöder
Collège du Sud
Travail de maturité
Mars 2017
Étude du sonneur à ventre jaune dans la vallée du Bas-Intyamon
Figure 1 : Sonneur mâle adulte (A.S. 27.05.16)
Figure 5 : Couple pendant l’amplexus lombaire (A.S. 07.05.16)
Face ventrale Jeune adulte prêt à partir (A.S. 21.08.16)
Face dorsale Jeune adulte prêt à partir (A.S. 21.08.16)
Sonneur adulte difficile à repérer de nuit (A.S. 02.08.16)
Figure 10 : Gouille typique en forêt (A.S. 10.08.16)
[A] Exemple d’habitat typiques du sonneur (A.S. 13.08.16)
[B] Exemple d’habitat typique du sonneur (A.S. 07.08.16)
[C] Exemple d’habitat typique du sonneur (A.S. 10.08.16)
[A] Poissons rouges et vairons présents dans les étangs (A.S. 13.08.16)
[B] Poissons rouges et vairons présents dans les étangs (A.S. 13.08.16)
[A] Les deux étangs de la zone 6 (A.S. 21.08.16)
[B] Les deux étangs de la zone 6 (A.S. 21.08.16)
Figure 17 : L’eau de la gouille est bleue à cause des minéraux dissous (A.S. 21.08.16)
Figure 20 : Deuxième trou avec toute la boue (A.S. 21.08.13)
Figure 21 : Gouille artificielle (A.S. 21.08.16)
Site n°2 Gravière Grandjean&Fils SA à Enney (gouille 1)
Site n°2 Gravière Grandjean&Fils SA à Enney (gouille 2)
Site n°8 Zone de compensation à Grandvillard
Site n°2 Gravière Grandjean&Fils SA à Enney (gouille 1)
Figure 12 :Carte de tous les sites possibles
(A.S. 30.04.16) [cliquez pour zoomer]